Chapitre 13 : Enlèvement

Une fois dans le portail, je ne comprenais pas vraiment ce qui m'arrivait. Il y eu des secousses, des bruits sourds, et j'étais entourée d'une lumière blanchâtre si aveuglante qu'elle m'empêchait de voir ce qui se passait. Soudain je ressentis un gros choc et, par réflexe, je fermai les yeux. Lorsque je les ouvris, tout autour de moi était sombre. De grands nuages gris flottaient dans le ciel et le soleil était sur le point de se coucher. Tout autour de moi se trouvaient des arbres de taille assez imposante et une légère brise faisait onduler mes cheveux rouges. Aucun doute, j'étais à Yume, et plus précisément dans une forêt.

Devant moi se tenaient Celestia et Hana. Hana semblait un peu surprise mais le visage de Celestia affichait surtout de la colère.

« Qu'est-ce que tu fous là ? hurla-elle. Ne me dis pas que...

-Elle a été emportée dans le portail avec nous, dit Hana d'une voix incroyablement douce et calme.

-Mouais, grogna l'autre. Et comment c'est possible ?

-Lorsqu'elle t'a tendu le pendentif, sa main a dû rester accrochée à la tienne et tu as dû l'entraîner avec toi.

Elle se tourna vers moi.

-C'est ça ?

-Heu... Oui, enfin je suppose. »

En réalité je n'avais aucune idée de ce qui s'était passé. Mais je n'avais qu'une envie, c'était de rentrer chez moi. Car là je n'étais pas simplement dans une autre ville ou un autre pays, mais dans un autre monde, et en pleine guerre. Et avec une personne qui de toute évidence me détestait.

-Bon, il ne me reste plus qu'à ouvrir un autre portail pour te faire rentrer chez toi, déclara Celestia.

Alors que j'étais soulagée de ne pas avoir à m'attarder dans un monde dont je ne connaissais rien, une voix grave retentit :

« Qui va là ? »

Nous sursautâmes. Devant nous se tenait une jeune fille qui devait avoir environ dix-huit ou dix-neuf ans. Elle avait de grandes ailes rose pâle et portait une armure. Elle tenait dans sa main droite une épée couverte de sang frais. Et son visage affichait une expression ferme signifiant qu'elle n'était pas là pour discuter.

« Halte là ! Vous avez des ailes noires, vous êtes donc des anges déchus, dit-elle de sa voix grave. Et cette jeune fille doit l'être aussi.

Elle avait prononcé ces derniers mots en me fixant d'un regard qui se voulait intimidant. Je murmurai à l'oreille de Hana :

-Qui c'est ?

-Une gardienne, me répondit-elle. Je ne sais pas si Celestia t'a tout raconté, mais les gardiens sont ennemis des anges noirs, elle veut sûrement nous mettre une raclée.

Je n'en revenais pas qu'elle puisse parler de combat de façon si relâchée.

-On va devoir se battre ? Demandai-je tout bas, même si je connaissais déjà la réponse.

-Je crains bien que oui. »

Celestia fit alors apparaître deux orbes mauves dans les airs et les lança sur la fille à l'épée. Cette dernière esquiva la prmeière et trancha la seconde avec son épée. Hana lança à son tour une énorme sphère dorée sur l'épéiste. Celle-ci l'évita de justesse mais lorsque la sphère tomba sur le sol, elle éclata en plusieurs balles jaunâtres et la femme aux cheveux roses s'en reçut une de plein fouet au visage. Je ne savais pas quels étaient les effets de cette attaque mais vu l'état de la jeune fille ça devait faire mal.

« Et merde, dit Celestia. Maintenant je n'ai plus assez de magie pour ouvrir le portail qui te fera rentrer chez toi.

-Qui était cette fille ? M'enquis-je.

-C'est Mami, une gardienne. Elle est très puissante et prend cette guerre très au sérieux. Il vaut mieux éviter d'avoir affaire à elle.

-Et qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

-Le village le plus proche est celui des anges. Rentrons nos ailes et allons-y. »

Elles firent disparaître leurs ailes. Alors comme ça les habitants de Yume pouvaient cacher leurs ailes. Il sera plus facile pour moi de passer inaparçue.

Nous marchâmes le plus vite possible pour arriver au village avant la tombée de la nuit. Lorsque nous étions arrivées, il faisait déjà sombre et froid. Nous avons marché dans les rue pour trouver une auberge où passer la nuit. Quelque chose avait retenu mon attention, c'était une bande d'enfants âgées de huit ou neuf ans qui s'amusaient ensemble comme si de rien n'était. Comment pouvaient-ils rire et arborer un large sourire innocent alors que leur monde subissait une guerre ?

J'étais dans mes pensées quand je reçus une tape sur l'épaule.

« Regarde, me dit Celestia.

Je levai les yeux. Devant moi se trouvait un bâtiment en bois un peu plus grand que les autres. On pouvait lire sur une pancarte accrochée au toit Auberge des Quatre Saisons. La plupart des lumières étaient allumées et j'aperçus au travers des fenêtres du rez-de-chaussée une grande cheminée. Je n'avais qu'une hâte : rentrer dans le bâtiment pour m'y réchauffer. Hana poussa la porte de l'auberge. Quelques clients étaient attablés et riaient de bon cœur. Une femme vêtue d'une robe rose pâle et portant un plateau s'approcha de nous. C'était sûrement l'aubergiste.

« Que puis-je faire pour vous ? Nous demanda-t-elle.

-Nous souhaitons passer la nuit ici, expliqua Celestia. Vous avez des chambres de libre ?

-Oui ! Une avec deux lits et une individuelle.

-Très bien ! »

Nous rentrâmes dans l'auberge. La femme nous indiquait les numéros de nos chambres en nous demandant d'aller nous y installer et redescendre pour prendre le repas. Celestia et Hana allaient partager la chambre collective tandis que j'allais dans l'individuelle. C'était la numéro 31 ; je grimpai les escaliers, longeai les couloirs puis vis tout au fond une porte où il était accroché une pancarte en bois où était inscrit le chiffre 31. Je poussai la porte et découvris une chambre assez spacieuse avec une armoire, une table de nuit et un lit. Je tournai les yeux vers la fenêtre. Cette dernière était ouverte et laissait entrer le froid dans la pièce, je m'empressai donc d'aller la fermer. Les enfants continuaient à rire si innocemment dehors. Soudain j'entendis la porte de ma chambre s'ouvrir. Je me retournai presque immédiatement. Sur le seuil de la pièce se trouvait Hana.

« Il est temps d'aller manger, me dit-elle. Finis de t'installer et rejoins-nous en bas. »

Je fis oui de la tête, après quoi elle tourna les talons. Je tirai vite les rideaux de la fenêtre et sortit de ma chambre pour aller en bas. Il n'y avait presque plus personne dans la salle à manger. La serveuse nous apporta, en dépit de la faim qui me tenaillait, des petits bols de soupe.

« Nous n'avons pas beaucoup de provisions, s'excusa-t-elle. À cause de la...

Elle laissa sa phrase en suspens et les deux amies se contentèrent de hocher la tête. La guerre devait être un sujet qu'on évitait d'aborder, ici. Tout en sirotant ma soupe, je fixai le petit estrade en bois situé au coin de la pièce. Alors que je me demandais à quoi il pouvait servir, plusieurs musiciens commencèrent à monter dessus et commencèrent à jouer un morceau. Cette musique était assez entraînante, mais si on écoutait d'une oreille attentive, elle dégageait une certaine tristesse.

Une fois la musique finie, nous applaudîmes. Je finis mon bol puis me tournai vers Hana :

« C'est quoi le plan pour demain ?

-Pour nous, on ne sait pas, mais toi tu rentreras certainement chez toi. Cette nuit, Celestia et moi allons nous reposer. Durant notre sommeil nous allons récupérer notre pouvoir magique, du moins suffisamment pour ouvrir un portail capable de te ramener sur Terre.

-Très bien... »

J'étais soulagée. Je voulais retourner chez moi le plus vite possible, car l'idée de rester dans un pays en pleine guerre ne me rassurait pas trop. Je bus encore un peu de soupe et montai à l'étage. Une fois dans ma chambre, je me glissai sous les draps de mon lit en m'endormis aussitôt. J'étais épuisée et n'avais qu'une hâte : retourner chez moi...

 

J'ouvris les yeux aux alentours de minuit. J'étais encore engourdie et fatiguée. Il semblait y avoir de l'agitation au rez-de-chaussée... Soudain je sentis une odeur étrange, comme une odeur de brûlé.

« Oh non. »

Je sortis immédiatement de ma chambre. L'aile est de l'étage avait pris feu, mais par chance l'escalier n'était pas condamné. Je descendis au rez-de-chaussée, où les rares clients de l'auberge se précipitaient dehors. Je suivis le mouvement. Une fois à l'extérieur, j'ai rejoint Hana et Celestia. Elles regardaient le bâtiment brûler, impassibles, comme si elles avaient l'habitude. L'aubergiste, elle, pleurait. Je m'apprêtait à demander à Celestia et Hana ce qu'on allait faire quand un cri retentit.

« Au secours ! »

Un cri d'enfant, sans doute. Nous nous retournâmes. Une jeune fille aux ailes de démon portant une faux enflammée tenait une fillette ange par le cou. Elle allait l'étrangler !

Celestia réagit au quart de tour. Elle fit jaillir une orbe mauve de sa main et la lança sur la démone. Celle ci lâcha la fillette et bascula sur la droite pour esquiver l'attaque. Hana envoya des dizaines de petites boules d'énergie sur la faucheuse, mais cette dernière se protégea avec son arme. C'est alors qu'elle déploya ses ailes et s'envola au-dessus de Hana. La pointe de sa faux se glissa dans le col de cette dernière. Elle souleva son arme et vola je-ne-sais-où, emportant Hana avec elle. Ni Celestia ni moi n'avions eu le temps de réagir, tout cela s'était passé extrêmement vite. Son amie s'était fait enlever par une démone, et pourtant elle garda son sang-froid. Elle marcha dans ma direction, me prit par la main et m'entraîna dans les rues du village, sans dire un mot.

« Euh... Qu'est-ce que tu fais ? Demandai-je, interloquée.

-Je vais chercher Hana.

-Mais la fille qui l'a enlevée est partie dans la direction opposée...

-On a quelque chose à faire avant. »

Je préférais ne pas d'avantage de questions. Nous nous arrêtâmes devant un magasin.

« Attends-moi ici, dit Celestia en entrant dans la boutique.

Elle ressortit vingt minutes plus tard, une combinaison noire, des bottes assorties et un katana à la main.

« Enfile-ça, m'ordonna-t-elle.

-Pardon ?

-Lorsque tu auras mis ça, on partira ensemble chercher Hana. »



23/12/2014
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